«Café Terminus» au Théâtre National du Luxembourg et au CAPE Ettelbruck
Visionnaire, révolté, clairvoyant, Frank Hoffmann ausculte la société et la dépoussière
Lors de la représentation de sa pièce «Café Terminus» Frank Hoffmann était présent, assis un peu en retrait, absolument confiant au jeu des acteurs qui allaient endosser les rôles des personnages qu’il a imaginé, mais je l’ai ressenti, à la fois un rien anxieux et très heureux. «Café Terminus» est un chef d’œuvre abouti, une longue réflexion, un texte engagé, social, un texte qui égratigne allègrement la société des bienpensants.
Je n’ai jamais vu autant de monde au Théâtre National du Luxembourg, la salle était archi-comble, le public adhérant à l’action, applaudissant à plusieurs reprises en plein spectacle. Ce, même si les situations grotesques et comiques ont un vaste arrière-goût de révolte et de mépris envers la société des empêcheurs de tourner en rond.
Le fils de l’écrivain Léopold Hoffmann et de l’artiste peintre Germaine Hoffmann nous a offert une œuvre de pleine maturité, réfléchie, ciselée, même si parfois brute et brutale, colorée, avec des vérités qui ne sont sans doute pas toujours bonnes à dire, mais qu’il est grand temps de dire, d’exprimer. Hoffmann en fout plein la gueule à ces luxembourgeois et autres, finalement, qui vivent avec des œillères.
L’auteur ausculte la société et la dépoussière ! Les personnages imaginés par Hoffmann ne mâchent pas leurs mots. Ils décapitent notre gouvernement, offrent en pâture certains de nos politiciens qui essaient de tout faire, pour empêcher la société à aller de l’avant. Il faut repenser modèle social et modèle politique pour éviter, que nous allions droit dans le mur. «Café Terminus» offre matière à réflexion.
Si le spectacle théâtral dure un peu plus de 150 minutes, vous ne vous ennuierez pas un seul instant. Ce, grâce à un texte fort, à une mise en scène réussie, à des actrices et à des acteurs qui possèdent un sens aiguisé du théâtre. Le rythme de «Café Terminus» est soutenu, la pièce est émaillée de chansons, de passages musicaux joués directement sur scène …
Avec cette pièce satyrique, toute l’équipe du «Café Terminus» veut en finir avec ce Grand-Duché des clichés, ce pays où celles et ceux qui se sont mis en tête, qu’ils (elles) sont des intouchables sont tristement plus nombreux que les autres.
Dans un bistrot, où un verre de Snaps a atteint à cause de l’inflation, le prix de 350 euros, se sont réunies douze âmes en perdition. Au Café Terminus ils font des constats amers, notamment celui, qu’il n’y a plus de futur ! L’action de la pièce se déroule en 2039, alors que le pays s’apprête à fêter ses deux cents ans d’indépendance.
Dans le Bassin Minier vient d’avoir lieu un attentat. Normal, les gens n’ont plus rien à se mettre sous la dent. Ils grelottent de froid. Aujourd’hui, le fait de seulement préparer un attentat conduit tout droit en prison. Alors qu’Histoire oblige, on se souvient de l’affaire du «Bommeleeër. Les coupables seront-ils un jour punis!, s’exclame l’un des personnages de la pièce de Frank Hoffmann.
Au Café Terminus, dans le temps, on jouait encore du théâtre, aujourd’hui il est devenu un lieu de prédilection pour les beuveries. Mais au Café Terminus, on a toujours la possibilité de lire, alors qu’ailleurs les livres sont interdits.
Si le Café Terminus marche encore plutôt bien, c’est parce que le patron a des relations. Ce bistrot, lance un autre, est la Mecque de toutes les illusions !
Pour écrire «Café Terminus», Frank Hoffmann s’est librement inspiré de la pièce «The Iceman Cometh» d’Eugene O’Neill.
Avec: Felix Adams, Marc Baum, François Camus, Esther Gaspart-Michels, Maria Gräfe, Nora Koenig, Hana Sofia Lopes, Marco Lorenzini, René Nuss, Adrien Papritz, Philippe Thelen, Serge Tonnar.
La mise en scène a été assurée par Frank Hoffmann, la dramaturgie a été confiée à Florian Hirsch, les décors et les costumes par Jasna Bosnjak, les effets sonores par Daniel Sestak. Les décors ont été fabriqués dans les ateliers du Théâtre National du Luxembourg à Bonn.
Prochaines représentations : Au Théâtre National de Luxembourg, 194, route de Longwy, à Luxembourg, les 23, 24 et 25 mars, chaque fois à 20 heures.
Coproduite par le CAPE – Centre des Arts Pluriels d’Ettelbruck, la pièce y sera jouée les 12 et 13 mai 2023.