«Maret», un film profond de Laura Schroeder
Après avoir visionné le film «Maret» de Laura Schroeder, une rencontre avec la réalisatrice s’imposait. Il s’agit d’un film plutôt intellectuel, un film qui raconte une histoire, pas un film d’action. Mais cela, je le savais, avant la projection. C’est un peu dommage qu’un confrère d’un autre organe de presse ai émis des avis négatifs sur le film, car pour ce dernier, souvent, ce sont les blockbusters qui le satisfont pleinement.
Victime d’une amnésie partielle, Maret (Susanne Wolff), 44 ans, enquête sur la personne qu’elle était avant de tout oublier. Maret prend conscience des choix de vie qu’elle a fait, devenant peu à peu une personne résolument insatisfaite et malheureuse. Un médecin de l’île de Lanzarote lui propose de mettre un terme à ses troubles par le biais d’une chirurgie du cerveau. Elle lui offre une promesse de paix intérieure et de satisfaction. Mais Maret, acceptera-t-elle de subir cette opération qui la priverait aussi d’une partie de sa personnalité.
Le sujet est complexe et, résolument, la réalisatrice Laura Schroeder, a voulu un film qui analyse ce qui se passe dans la tête, dans le cœur et dans l’âme de Maret. Nous accompagnons la jeune femme au fil de ses délires, de ses questionnements, de ses angoisses. Cela, effectivement, ne mène pas à un film d’action, mais à un drame bien construit, bien ficelé. Si le film exige que le public commette quelques efforts, ces efforts sont finalement récompensés. De quoi donner une très bonne notre à Laura Schroeder.
Cédons la parole à la réalisatrice : «Je me suis longtemps interrogée sur ce qu’il pouvait rester encore de nous, si on oubliait notre passé. C’est la question originelle, à la base de mon scénario. En l’absence de réponse, j’ai investigué, notamment sur le volet scientifique. Comme beaucoup de gens dans notre société, j’ai grandi avec l’idée que la psychanalyse pouvait régler par la parole de nombreux problèmes. Or, j’ai appris, notamment grâce à un neurochirurgien, que pour une partie du monde scientifique, beaucoup de troubles avaient une origine organique. Il suffit désormais de pousser un bouton pour régler de nombreux problèmes.
J’ai découvert ce que l’on appelle la stimulation du cerveau profond. C’est de là qu’est venu un des axes du film, consistant à s’interroger sur la possibilité de devenir quelqu’un d’autre par les moyens de la science. Si cela devient possible, il reste encore la volonté de faire appel à ces moyens.
Est-ce que nos blessures ne sont pas une partie constituante de notre personnalité ? Est-ce qu’on accepterait de vivre sans nos douleurs ?
Ce qui m’intéresse le plus, c’est de tenter de comprendre pourquoi on choisit une manière de vivre plutôt qu’une autre. Comme Maret, nous sommes souvent tiraillés entre deux pôles : d’un côté une existence rangée, plutôt calme et de l’autre, une vie plus agitée.
Je pense que la fin de mon film choque beaucoup de gens. Nous vivons à une époque, où l’on préfère les happy-ends. Or, ce n’en est pas un dans mon film ! Pour moi, il était important d’aller au bout de ma réflexion.»
Quels seront les choix de Maret ? Je ne vais pas les trahir dans le cadre de mon article, mais je vous invite à aller voir ce film.
Le film «Maret» de Laura Schroeder est finalement une œuvre cinématographique fascinante à bien des égards !
Laura Schroeder est de nationalité luxembourgeoise. Son deuxième long-métrage, «Barrage», avec Lolita Chammah et Isabelle Huppert, a été présenté à la Berlinale en 2017, avant de représenter le Luxembourg aux Oscars. «Maret» a été sélectionné en compétition au Luxembourg City Film Festival.
Les autres acteurs du film sont : Iben Hjejle dans le rôle du Docteur Moore, Álvaro Cervantes dans celui d’Arnau, Stephan Kampwirth dans celui de Thomas, Laura Tonke dans celui d’Yvonne, Filip Peeters dans celui d’Elias, Judith Hofmann dans celui de Signe, Monique Reuter dans celui de Birgit, André Jung dans celui de Dominik, Nickel Bösenberg dans celui du Galeriste, Sascha Ley dans celui d’Hannah Skolarczik, Germain Wagner dans celui du Docteur Leonhardt …
Depuis sa création il y a vingt-cinq ans maintenant, la société de production luxembourgeoise Tarantula s’est taillée une excellente renommée dans le partenariat avec le cinéma indépendant. Ses films sont régulièrement présents aux festivals internationaux majeurs comme Cannes, Toronto, Venise et Locarno.