Kultur15. Juni 2021

Hommage à Guy Wagner

Die Winterreise

de Michel Schroeder

Lors de la soirée d’hommage à Guy Wagner, la salle de spectacles du Trifolion d’Echternach était remplie, dans les limites des règles sanitaires en vigueur.

Sincèrement, je m’attendais à une soirée exceptionnelle, et ce fût bien le cas. Finalement, ne fût-t-elle pas plus qu’exceptionnelle ? Je pense bien que oui. En écrivant ce qui précède, peut-être suis-je influencé par les liens qui m’unirent à Guy Wagner, un personnage qui m’a souvent aidé, soutenu, ouvert des portes. Merci Guy !

Un véritable monstre sacré

Guy Wagner est une anthologie, un mammouth aux nombreuses et intarissables compétences, un monstre sacré de la scène littéraire, ainsi que de la scène culturelle de notre pays.

Il a été instituteur à Beidweiler, Differdange et Esch-sur-Alzette. En parallèle de sa carrière d’instituteur, il a effectué des études de lettres françaises à l’Université de Metz. C’est en qualité de professeur qu’il a ensuite enseigné au Lycée de garçons d’Esch-sur-Alzette, au Lycée technique Mathias Adam de Pétange, au Lycée technique Joseph Bech de Grevenmacher, ainsi qu’au Lycée des Arts et Métiers de Luxembourg.

Il dirigea très habillement le Théâtre municipal d’Esch-sur-Alzette et coordonna, jusqu’à sa démission, les manifestations organisées dans le cadre de Luxembourg capitale européenne de la culture 1995.

Guy Wagner a dirigé des troupes de théâtre scolaire, et a été cofondateur de l’Académie européenne d’été. Il a également collaboré à avec une multitude de journaux et de revues. Il coédita, avec Guy Rewenig, l’hebdomadaire «Kontrast. Wochenschrift für freie Meinung».

Ses œuvres poétiques et théâtrales sont très engagées. Son dernier ouvrage, publié sous le titre «In c-Moll» aux éditions Le Phare, est en quelque sorte son testament littéraire. Dans ce recueil posthume sont publiés des textes qu’il a écrits entre 1971 et 2015.

Un fin connaisseur

Dans la vie et l’œuvre de Guy Wagner, l’art dramatique a occupé une place importante lorsqu’il a été directeur de théâtre, mais aussi et sans doute surtout, en ses qualités d’auteur et de critique. Il a été un fin connaisseur de l’œuvre de Samuel Becket. Il a déclenché une importante vague de polémiques avec sa pièce «Ee wéi deen aneren», lors de sa diffusion à la télévision. Il n’avait pas hésité, à travers son texte dramatique, à émettre de sévères critiques sur la société et la famille.

Il a fait une étude sur le compositeur Penderecki (dont il m’a offert un jour un LP), et a écrit une biographie de Mikis Theodorakis (Editions Phi), publiée en langues française et allemande. Dans le riche ouvrage «Luxemburger Komponisten heute» il a présenté la vie, ainsi que l’œuvre d’environ quarante compositeurs luxembourgeois contemporains.

A travers son étude «Frère Mozart» il a développé la facette franc-maçonnique du compositeur. Ce livre a été également publié en allemand sous le titre «Bruder Mozart».

Dans son livre «Doppelleben», il n’a pas hésité un seul instant à critiquer le prêtre catholique d’origine luxembourgeoise, Robert Alesch, collaborateur des Allemands pendant la Seconde Guerre mondiale. Ce personnage louche a dénoncé un réseau de la Résistance auquel appartenait, entre autres, Samuel Beckett.

L’œuvre littéraire, ainsi que l’engagement politico-culturel de Guy Wagner a été récompensé par de nombreux prix et distinctions : lauréat du prix René Oppenheimer pour son opposition au racisme, à l’intolérance et à la xénophobie, il a été plusieurs fois récompensé au Concours littéraire national, et honoré par le Prix des amitiés Grèce-Luxembourg. En 2010, il a reçu le Prix du mérite culturel de la Ville d’Esch-sur-Alzette.

Winterreise

Je viens de lire, en diagonale certes, l’excellent roman de Guy Wagner, publié chez Phi, sous le titre «Winterreise».

Tout au long des vingt-quatre chapitres de ce texte dense et coloré, l’auteur raconte et met en scène la vie et l’œuvre du célèbre compositeur autrichien Franz Schubert. Pour ce roman, l’auteur a été récompensé par le premier prix, dans la catégorie roman, du Concours littéraire national en 2004.

Le texte met en lumière un compositeur exceptionnel, tout en étant un plaidoyer pour la liberté et la justice.

Lors de cette soirée, les actrices et acteurs qui ont lu, de manière brillante et vivante, des extraits de cette œuvre, ont rendu le roman très attachant. Raison pour laquelle, ne l’ayant jamais lu auparavant, je n’ai pas hésité à en acquérir un exemplaire.

Les lectures furent agrémentées d’extraits de compositions de Schubert. Ce programme très réussi a été conçu par Charles Muller.

Ont lu des extraits de l’œuvre de Guy Wagner : Fabienne Hollwege, Leila Lallali, Charles Muller, Christiane Rausch, Andreas Wagner, Germain Wagner.

Le public ravi a également pu entendre les œuvres de Franz Schubert suivantes : Die schöne Müllerin D 795, Das Wandern ist des Müller’s Lust, Freunde der Kinderjahre D 455, et les extraits de Winterreise D 911 : Der Lindenbaum, Im Dorfe, Erstarrung, Letzte Hoffnung, Einsamkeit, Der Leiermann, brillamment interprétés par Sabine Weyer, au piano, et Dimitri Maslennikov, au violoncelle.