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Dérive préoccupante de l’Italie

Un avenir toujours plus... noir !

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Ce ne sont pas les scandales qui manquent en Italie. On n’a pas fini d’en évoquer un, qu’il en surgit un autre. Il est vrai que, rien que le président du Conseil italien, Silvio Berlusconi, à lui seul, collectionne les scandales en tous genres. Il collectionne également les procès, qu’il arrive cependant à éviter en faisant adapter la législation à ses nécessités. Il soutient, pour se défendre, être la victime (innocente !) d’un acharnement judiciaire de la part des toges « rouges » (juges).

La corruption est elle aussi toujours plus répandue dans l’administration italienne et, en particulier, dans les secteurs de la santé et des travaux publics.

Dans son rapport annuel de 2010, la Cour des comptes fait savoir qu’en 2009 en Italie, les délits de corruption ont augmenté de 229% et ceux de concussion de 153%.

Le comble c’est que, face aux nombreux scandales politico-financiers qui ébranlent le gouvernement et la majorité, Silvio Berlusconi, prétend vouloir lutter contre ce phénomène, alors qu’il est lui-même jugé à Milan pour corruption d’un avocat dans l’affaire Mills.

En peu de temps, deux affaires ont une fois encore secoué l’opinion publique, une de corruption dans la Protection civile et l’autre de fraude fiscale et de blanchiment d’argent dans les groupes de télécommunications Fastweb et Telecom Italia Sparkle.

Le social connaît également ses scandales. En effet, le gouvernement Berlusconi est décidé a, d’une part, mettre « hors état de nuire » l’article 18 du Statut des travailleurs, un des principaux instruments de défense des travailleurs contre les abus patronaux dans les conflits du travail et, plus grave encore, introduire les contrats individuels de travail, ce qui va à l’encontre des lois et des contrats nationaux du travail. Si ces mesures devaient passer, les patrons pourraient agir à leur guise, licencier et engager le personnel comme bon leur semble, ils auraient véritablement carte blanche. Pour Paolo Ferrero, secrétaire de Rifondazione comunista et porte parole national de la Fédération de la Gauche, si ces mesures étaient adoptées, cela équivaudrait à balayer les acquis sociaux obtenus par le mouvement ouvrier en un siècle de luttes. C’est pour protester contre cette politique que Paolo Ferrero, et Roberta Fantozzi, responsable du travail et du welfare du secrétariat national de Rifondazione comunista, ont débuté, il y a une semaine, une grève de la faim.

Le patronat pouvait-il songer à un plus beau cadeau à l’approche des élections régionales qui se tiendront les 27 et 28 mars prochains ?

Et les élections régionales n’échappent pas à la règle, elles ont aussi eu droit à leurs scandales. Le premier a été engendré par la réduction au silence, durant le mois précédant ces élections, des voix dissidentes à la Rai.

Le dernier en date, est le plus grave. Les listes du parti de Silvio Berlusconi (PDL), en Lombardie et dans le Lazio, avaient été refusées, la première pour vice de forme et la seconde pour ne pas avoir été présentée en temps voulu. Lorsqu’il a appris cette nouvelle, le ministre de la Défense, Ignazio La Russa, n’a pas hésité à brandir la menace d’«  être prêts à tout », s’ils ne pouvaient participer aux élections dans ces deux régions. Une réaction, en somme, « normale » pour quelqu’un issu du Mouvement social italien. Mais finalement, il n’aura pas eu à mettre sa menace à exécution. Silvio Berlusconi a, sans consulter l’opposition et contre l’avis du chef de l’État, décrété la réouverture des délais de dépôt des listes pour les élections régionales des 28 et 29 mars prochain, et ainsi tout est rentré dans l’« ordre » et ce avec, cette fois, le consentement du chef de l’Etat. Incroyable mais vrai !
Comme le disait très bien un responsable local de Rifondazione comunista dans une lettre adressée au président de la république, Giorgio Napolitano : « Une fois que l’on a remis sa copie à un examen, on ne peut plus y apporter de modifications et, l’enseignant, ne peut pas non plus adopter une nouvelle règle relative au déroulement de l’examen pour un seul élève ».

Mais voilà, si la liste du PDL en Lombardie a finalement été admise, ce n’est pas le cas de celle du Lazio, le Tribunal administratif régional ayant une nouvelle fois rejeté la liste du PDL, à la grande colère de Berlusconi, qui annonce une grande manifestation le 20 mars à Rome, où il prendra la parole pour « expliquer la situation aux italiens ».

En Italie on comptait en 2009, 627.000 voitures publiques (72.000 aux USA, 61.000 en France, 54.000 en Allemagne). Or, pour « épargner » 178 millions d’euros, ce gouvernement envisage de couper le financement public à la presse, mettant en danger non seulement l’existence de 92 publications et ainsi le peu de pluralisme de l’information qui existe encore, mais aussi l’emploi de près de 2.000 journalistes, de 2.500 polygraphes, techniciens, employés administratifs, et de 20.000 autres collaborateurs occasionnels.

Face à tout ceci, n’y a-t-il vraiment pas de quoi se préoccuper quant à l’avenir de la démocratie dans ce pays ?
Berthold Brecht avait raison lorsqu’il disait : « le ventre est encore fécond d’où a surgi la bête immonde ».

Ivano Iogna Prat